Le gouvernement doit présenter ce mercredi en Conseil des ministres son projet de loi « plein emploi », qui va donner naissance à France Travail, le successeur de Pôle emploi. Mais les syndicats s’inquiètent pour les bénéficiaires de RSA qui, comme tous les inscrits, devront signer un contrat d’engagement au début de leur parcours.
Une seule porte d’entrée pour toutes les personnes en recherche d’emploi ou rencontrant des difficultés d’insertion, dont les bénéficiaires du RSA, c’est l’ambition portée par France Travail, l’organisme promis par Emmanuel Macron lors de sa dernière campagne. Sa naissance est prévue le 1er janvier 2024 et devrait être actée ce mercredi en Conseil des ministres. Pôle emploi s’appellera lui-même France Travail et sera l’opérateur en chef de ce réseau.
Pôle Emploi et l’ensemble des acteurs (missions locales, Cap emploi mais aussi collectivités…) devront mieux fonctionner en réseau avec des systèmes informatiques interconnectés.
Aujourd’hui, « les répartitions de compétences sont un peu complexes », a souligné jeudi Elisabeth Borne, entre l’Etat chargé de l’accompagnement des demandeurs d’emploi, les régions de leur formation, les départements de l’insertion des bénéficiaires du RSA, les collectivités des enjeux de garde d’enfants ou de logement… « Il ne s’agit pas de faire un big bang institutionnel mais de jouer collectif », a-t-elle résumé.
Atteindre un taux de chômage autour de 5% en 2027
L’exécutif mise sur cette transformation pour atteindre le plein emploi, soit un taux de chômage autour de 5% en 2027 (contre 7,1% actuellement), avec en toile de fond l’idée que « personne n’est inemployable ».
Concrètement, chaque inscrit à France Travail signera un contrat d’engagement au début de son parcours. C’est dans ce cadre qu’un accompagnement rénové des allocataires du RSA est expérimenté dans 18 départements avec la question sensible des 15 à 20 heures hebdomadaires d’activité dans « une logique de droits et devoirs ».
Pas formellement inscrites dans la loi, ces heures (immersion, remise à niveau, rédaction de CV…) seront un objectif « adapté » à chacun, a précisé le ministre du Travail Olivier Dussopt, insistant sur le fait que ce ne sera « ni du travail gratuit, ni du bénévolat obligatoire ».
Il rappelle que le contrat entre l’allocataire et son conseiller « existe depuis la création du RMI en 1988 », mais qu’actuellement « sur 1,950 million de bénéficiaires du RSA, 350.000 n’ont aucun suivi ». Pour le ministre, « ce qui pêche, c’est l’accompagnement. On n’est pas quitte de notre devoir de solidarité quand on a versé 607 euros ». Le projet de loi réforme les sanctions pour les allocataires qui ne respectent pas leurs obligations. Il permettra désormais de suspendre temporairement le versement du RSA, avant une décision de suppression. La décision restera prise par le président du conseil départemental.
Les syndicats s’opposent « à toute atteinte au principe de solidarité nationale avec la réforme du RSA »
Ce volet préoccupe les syndicats qui ont rappelé en intersyndicale « leur opposition à toute atteinte au principe de solidarité nationale avec la réforme du RSA ». Du côté de la CFDT, Marylise Léon a prévenu vendredi dans l’Humanité que la conditionnalité du RSA « est une ligne rouge ». Denis Gravouil (CGT) reproche au gouvernement de jouer sur le fait que « contrairement aux retraites », une partie de l’opinion pense qu’il faut « tomber » sur les allocataires du RSA.
ujourd’hui, la radiation est « réservée à des cas très graves de fraude ou autre », dit-il à l’AFP. Là, ils veulent « des sanctions soi-disant graduées mais en fait beaucoup plus fréquentes, ce qui est inadmissible ». Parmi les 60% d’allocataires du RSA non-inscrits à Pôle emploi, « on retrouve des situations de handicap, des situations sociales extrêmement difficiles et c’est absurde de prévoir 15 à 20 heures d’activité ».
Si Jean-François Foucard (CFE-CGC) note « des plus-values opérationnelles », dont le fait que ce soit « plus fluide » pour les demandeurs d’emploi, il se dit aussi « très dubitatif dans le fait de sanctionner ceux qui sont les plus abimés ». Pour renforcer l’accompagnement, il y aura « des moyens supplémentaires », a assuré Olivier Dussopt, rappelant que le rapport préfigurant la réforme avait chiffré son coût « entre 2 et 2,5 milliards d’euros en cumulé jusque 2027 ». Mais cela passera aussi par des redéploiements de postes de Pôle emploi.
« Un projet flou, régressif et recentralisateur »
La gouvernance de ce réseau est aussi contestée. Régions de France a notamment dénoncé « un projet flou, régressif et recentralisateur ».
Les syndicats s’inquiètent également de la mise en place d’une nouvelle usine à gaz, peu opérationnelle. Thibault Guilluy, haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, et qui planche sur ce dossier depuis un an, s’en défend : « Je suis un entrepreneur, un opérationnel. Pas un technocrate. Les choses vont se mettre en place à partir du terrain, avec une approche pragmatique. Nous allons au contraire gagner en efficacité … ». Il est d’ailleurs largement pressenti pour prendre la tête de ce nouvel organisme et succéder ainsi à Jean Bassere, l’actuel patron de Pôle emploi. Si Thibault Guilluy dément toute nomination prochaine, elle pourrait intervenir rapidement.
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Source :www.latribune.fr